La 2ème vie des planchettes à vacherin - Créat'Art Déco

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La 2ème vie des planchettes à vacherin

L'artiste
                           Collection « Economies laitière et alpestre »
                                                        No 103
 
 
                              Claude-André Depallens – Rémy Rochat
 
 
              LA DEUXIEME VIE DES PLANCHETTES A VACHERIN
                                                        2008 
 

  
 
 
 
                                              Editions le Pèlerin
                                                           2008
 
 
  
  
    Photo de couverture :
une des œuvres typiques de l’artiste, pour vous offrir cette lumière extraordinaire des premiers âges au-dessus de nos forêts dont la stylisation offre un élément graphique de la plus haute importance.
 
 
 
    Introduction
 
    Claude-André Depallens est un artiste passionné par l’inédit, avide de vous proposer des trucs jamais courus par personne ou demeurant  du domaine du confidentiel, comme des peintures changeant de couleur selon l’angle duquel vous les regardez, des toiles phosphorescentes aptes à vous surprendre une nuit alors que vous vous êtes rendu chez lui et que vous n’avez pas su trouver  l’interrupteur ! 
    Sa dernière trouvaille, et probablement l’une des meilleures, des œuvres peintes sur fond à vacherin. Etonnamment l’artiste croyait ici avoir introduit une nouvelle façon de faire, tandis qu’il n’était que le continuateur d’une technique mise au point il y a quelque trente ans par un autre artiste, aujourd’hui décédé, Michel Chaperon,  en son temps citoyen de Derrière-la-Côte où il avait eu l’originalité de racheter l’ancienne laiterie et ses annexes afin de la transformer en habitation et en atelier. Mais tout cela date  un peu, tandis que Claude-André Depallens nous propose des œuvres toutes chaudes encore et dont certaines, par reproduction, seront à découvrir plus bas[1].
     Il est incontestable que ces productions font partie de l’histoire, et qu’elles témoignent d’un beau respect pour ces vieux affineurs des Charbonnières ayant œuvré leur vie durant à affiner des vacherins et à les vendre, métier pas facile s’il en est, demandant une volonté et une ténacité exemplaires. Un hommage qui n’est donc pas de trop, et même s’il arrive un peu tard, puisque cette profession d’affineur est en voie d’extinction dans ce  village ayant  pourtant,  selon toutes les apparences, vu naître le vacherin sur sol suisse.
    Heureux Claude-André Depallens trouvant son bonheur dans des découvertes tous azimuts sur lesquelles il se jette avec une énergie surprenante. Point aussi non résoluble à propos de cet artiste original, comment peut-on vivre et travailler, professionnellement il s’entend, et trouver encore le temps de produire autant ? C’est là un mystère insondable. A moins qu’il ne faille admettre que pour CAD, les journées ne sont pas pareilles aux nôtres, c’est-à-dire que pour lui elles auraient au moins 36 heures, tandis que pour nous, elles restent faites de vingt-quatre heures, et pas une de plus !
    Il faut le voir pour le croire. Une idée est à peine formée, l’œuvre est déjà accomplie, et celle-ci suivie de quantité d’autres créations, le tout produit à un rythme effrayant. Ainsi les planchettes peintes, c’était un projet, et voici maintenant 60 foncets prêts pour une future exposition, ou simplement pour être mis à disposition des amateurs de décorations originales.
    Cette production impressionnante est par ailleurs signalée dans un texte de cet artiste qui précise qu’après 28 ans de peinture et de créations diverses, il peut se targuer de vous proposer sa 1700e création ! Si vous faites le compte, cela en fait 60 par année, soit plus d’une par semaine. Il faut vouloir ne plus dormir pour accoucher d’un tel monument, c’est-à-dire d’une production si conséquente qu’elle défie presque l’imagination.
    Claude-André Depallens a aussi ceci de particulier qu’il crée en deux endroits différents, au bord du Léman et à la Vallée. Il saute d’un coin à l’autre, très certainement animé d’une même affection pour l’une ou l’autre de ces deux régions pourtant  très dissemblables.
    Aux Charbonnières il tient atelier dans l’ancienne douane dite le Poste, à la route de Mouthe, disons à la mode d’autrefois dans le Haut du Village, au no 21. Il ne fait aucun doute que si vous le visitez, vous trouverez une œuvre en gestation sur sa table de travail, avec une technique peut-être nouvelle. L’artiste saura vous l’expliquer. Mais attention, sa passion quand il vous la conte fait monter le compteur, et à un point tel que bientôt il  aura peine à vous exposer  ses innombrables souhaits d’ordre artistique. Oui, l’homme  a tellement de choses à dire, tellement de projets qui n’attendent que l’heure bénie d’être mis en route, et tous nouveaux et plus exaltants  les uns que les autres, qu’il ne sait plus trop par quel bout prendre son discours afin de vous amener à la compréhension la plus parfaite de son programme.
    Des idées, ainsi, il en a à revendre. Il ne sait même plus où les mettre. De telle manière qu’à lui il lui faudrait, on le suppose,  deux ou trois vies d’homme mises bout à bout, celle-ci ne pouvant en aucun cas  lui suffire, pour accomplir cette grande œuvre à laquelle il rêve depuis bientôt trois décennies.
    L’artiste pourtant, derrière une apparence de bonheur sans restriction, révèle des zones d’ombres. Et celles-ci, non, il ne cache aucun acte répréhensible quelconque,  sont l’épreuve du feu qu’il a du subir par deux fois, et à très peu de distance l’un de l’autre. Redoutable destruction de peintures qui lui avaient coûté tant de peine, et tellement de temps. Il en souffre encore. Il en souffrira toujours. Mais en même temps il sait que de tout mal peut sortir un bien. Et c’est ainsi qu’après une période de doute, il a repris sa palette pour se donner plus encore à une peinture dont le propre est de ne pas rester figée,  mais d’évoluer sans cesse. Il le sait trop bien, que des artistes se sont cassés les dents de toujours faire la même chose, n’innovant jamais en rien et qui pour finir s’étaient dégoûté de leur propre peinture ne leur apportant désormais plus aucune satisfaction.  Mais pour lui, sa devise ici serait peut-être de toujours se surprendre soi-même, pas de problèmes. Ainsi s’il peint aujourd’hui des fonds à vacherin, demain il  retournera à ses fenêtres anciennes dont les six carreaux de verre sont remplacés par des panneaux peints ou bien il reprendra sa série des Chalottet, alpage qui semble l’avoir inspiré plus que d’autres. On est si bien, là-haut,  près des nuages…
    Voilà Claude-André Depallens brièvement esquissé en ce qui concerne son côté artiste, et qu’il faut fréquenter pour comprendre qu’en plus de sa passion, il a le cœur sur la main et que surtout il sait écouter l’autre, et qu’il a compris que l’on ne peut vivre bien que dans le partage, d’une œuvre, d’une amitié ou de projets similaires. Il connaît aussi ce miracle d’avoir une épouse admirable, artiste elle-même, sachant le comprendre et le seconder quand il le faut.
    Ceci dit nous sommes heureux de produire cette brochure comprenant nos textes et les siens, ces deux proses mêlées pour offrir aux  lecteurs désireux de lire cette modeste publication, quelques pages vraiment originales et témoignant  surtout d’une époque qui ne reviendra plus et qu’il était temps de fixer pour la postérité.
    Notre collection « Economies laitière et alpestre » accueille donc  aujourd’hui un titre pas si incongru qu’il pourrait paraître.
    Bonne lecture, et bonnes découvertes dans la production de cet artiste d’ici et d’ailleurs  qui se fera à coup sûr un plaisir de vous ouvrir l’une ou l’autre de ses deux galeries.
 
    Les Charbonnières, en janvier 2008 :
 
  
  
    Autrefois…
 
    Les fonds
– ou foncets –
 
    Les fonds, c’étaient de petites planchettes de bois de 35 sur 17,5 cm environ, de 1,2 à 1,5 cm d’épaisseur, cela pour les petits, de 35 sur 35 cm et de même épaisseur, ou avec un poil de plus, pour les grands ou les gros.  Ces planchettes  servaient trois semaines en cave, avec deux petits vacherins sur les petites,  et un seul, un gros, pour les grandes. Puis, quand on avait sorti les vacherins des caves,  qu’on les avait emboîtés, les fonds quittaient, sur le même chariot qui les avait amenés ou portés par l’un ou l’autre des acteurs de cette saine activité locale, le local d’emboîtage pour aller prendre place dans le coin où on les lave, pour chez nous, par exemple,  au bas des escaliers de la cave. On s’attelait au lavage dès que les piles étaient trop conséquentes, qu’elles finissaient par vous faire peur tant elles avaient pris du volume. Et ça montait vite, je peux vous le dire, les piles de fonds sales. Tu as fait la place  belle nette par un après-midi entier de lavage où tu as pu mener sécher tes fonds aux derniers rayons d’un soleil de fin d’après-midi, le lendemain, en fin de journée, hop, c’est déjà tout plein, crénom !
    Je lavais souvent les fonds moi-même, ce qui ne me déplaisait pas. Les tremper d’abord dans le bassin de ciment, par grandes piles de cinquante peut-être que l’on peut coincer au fond et par dessus lesquelles on fait aller les deux robinets pendant cinq minutes, eau chaude et eau froide, ouverts en grand, de quoi remplir le bassin avec ses fonds dedans. Les tremper ceux-ci,  juste ce qu’il faut, plutôt plus que moins, afin que la saleté qu’ils ont en surface et sur les côtés, la morge, puisse s’en aller sans trop de peine.
    Ensuite hardi petit, dans le temps on lavait à la brosse rizette, on en avait usé des dizaines, et frottes que tu frottes, mon gaillard, alors là il t’en faut vraiment, de l’huile de coude, des burettes pleines, on lave tout ça à grande eau.
Ca fait tchip, tchip, tchip.
Cinq coups sur la planchette, une plongée dans l’eau avec la brosse, on a laissé un espace libre pour ce faire, et à nouveau cinq coups sur la seconde face. Et puis tes fonds, tu ne mélanges jamais les grands et les petits quand tu les laves, tu les entasses devant toi, en bout de la planche sur laquelle tu oeuvres, contre le mur, juste sous le robinet, pardi, ce qui t’empêchera de faire des piles trop grandes. Et quand la pile est à ta convenance, vingt à trente planchettes, tu la prends, tu la couches sur la planche, et hop, maintenant, en quatre fois, tu laves les bords où la tranche. Que tout soit parfaitement propre, nickel, comme ils disent maintenant, ces ploucs !
    Nous passâmes nous aussi à la machine à laver. Alors parfois je mettais de la musique, ça aide. Les Rolling Stones, les Beatles, tout ça vous situe une époque. C’était une machine avec deux rouleaux en brosse  à l’intérieur, du nylon qui ne s’userait pas, devrais-tu le servir pendant cent ans. Incroyable ! Et les deux rouleaux tournent naturellement dans le sens contraire, afin de happer la planche 
 
 
Edgar Rochat, le pêcheur du village, en mal d’activité l’hiver, lave chez Toti
 
que tu présentes d’un côté de la machine. Une pompe prend l’eau du bassin qu’elle gicle sur les brosses. L’eau ensuite retourne au bassin par un écoulement approprié. C’est en circuit fermé, qu’on pourrait dire. Et ça forme pour finir un sacré bouillon de culture dans le bassin. Ça réensemencera les prochains vacherins, pensais-je. D’ailleurs le soleil, quand on étendra les fonds mouillés derrière la maison, il tuera toutes les bactéries. Le meilleur des désinfectants, m’avait dit un jour un spécialiste. J’étais naturellement le premier à le croire. Ce qui est nature vaut toujours son pesant d’or. La chose jouait certes pour les bactéries les plus insignifiantes, mais pour les autres, par contre… on aurait l’occasion d’en reparler ! Mais dans un premier temps, n’associez nullement nos problèmes de 1985-1987 à nos méthodes ancestrales. La chose aurait pu durer éternellement s’il ne s’était agit, disons-le carrément, surtout d’une question de malchance.
    Mais retournons à nos fonds, à ces bons vieux fonds d’autrefois que les grandes planches ont désormais remplacés. Avec la machine, on peut régler l’écartement plus ou moins large des rouleaux grâce à une grosse vis placée dessus. En fait il m’apparaît  par le souvenir que je devais donner pour les gros fonds  deux tours de plus à celle-ci. Quand l’eau du bassin était trop sale, après qu’on ait lavé tous les fonds d’une série, on l’évacuait. Pour cela on retirait un tube qui faisait la hauteur du bassin, planté qu’il était dans le trou du fond, ce qui permettait de le retirer sans se mouiller les bras. Et quand le bassin était vide, de bleu, si tu avais pu voir ce qu’il y avait au fond ! Pas appétissant pour deux sous, et surtout pour un néophyte. Pour nous qui en avions l’habitude, rien que de l’ordinaire. Une grosse soupe brunâtre, avec des morceaux de croûtes dedans, des élastiques, des bouts de sangles, que tu sortais du bassin pour éliminer le reste en giclant de l’eau propre du robinet. Allez, tout ça à la station d’épuration. D’ailleurs, une nouvelle fois, mis à part les élastiques, rien que des produits naturels, pas leurs charogneries de trucs chimiques qu’ils ont imposés plus tard !
    Et voilà, toi, pour une nouvelle série de fonds, tu es derrière ta machine et tu laves. Tu introduits un fond par la droite, là où est le bassin, tu le bougeottes un peu entre les brosses, tu le lâches, il ressort tout seul de l’autre côté. En fait même, ton fond, la machine n’est pas si grande que ça, tu peux le tenir, ce me semble, par les deux bouts et le faire aller et venir entre les rouleaux. A la sortie tu le prends et tu fais une pile qui dégouline. Et quand la pile est à bonne hauteur, tu l’empoignes, heureusement que tu as un grand tablier imperméable qui te va jusqu’aux chevilles, on voit juste le bout de tes bottes noires qui dépasse, tu l’empoignes, et tu vas la déposer sur la tranche juste à côté. Ainsi de cette manière l’eau peut s’écouler de tes fonds  jusqu’au moment où tu les reprendras pour aller les étendre derrière la maison. Il y a épuration, ils perdent lentement cette eau qu’ils gardaient encore en surface. 
 
 
 
Séchoir derrière chez Gaston Rochat
 
    Les fonds, avant que tu ne les laves, ils ont gogé un bon quart d’heure dans le bassin. Faut ça pour ramollir la saleté qu’ils ont dessus. Si tu les laves trop vite, il te faudra plus de temps pour qu’ils soient propres. C’est tenace, tu sais, cette morge, surtout quand elle a eu le temps de sécher. Et quelles encatollées ils ont parfois, tes fonds, quand les vacherins,  par exemple, en cave,  ils ont fait des grandes chandelles en bas des tablars. On a tout vu. Et on en verra d’autres encore, et des vertes et des pas mûres, et puis aussi notre enterrement de première classe ! Mais tout ça, c’est de la musique d’avenir, donc sans importance. Pour l’instant on chante, on accompagne les Beatles dans un étrange langage dont on invente les mots, puisqu’on ne sait pas l’anglais et que par conséquent on ne comprend aucunement ce qu’ils racontent. On chante aussi pour accompagner le bruit de la machine et de la pompe. On est les trois,  en harmonie, plus les robinets quand ils coulent. On est tous ensemble dans ce petit coin de maison. On n’est pas malheureux. On sait que pendant ce temps, les autres, là-bas, dans les locaux d’emboîtage, ils préparent les expéditions Ils ont le téléphone qui n’arrête pas de sonner, autant pour les commandes que pour les réclamations. Tandis qu’ici, on est tranquille. Personne ne nous dérange. On est bien, allez.
    Mais voilà, les entassements de fonds lavés sont maintenant considérables. Il n’y a même plus de place. Et puis l’après-midi gentiment se tire. Faut profiter du dernier soleil de la journée. Alors la machine, voilà, on l’arrête. Ca fait tout drôle qu’il n’y ait plus ce bruit familier de moteur. C’était assurément une compagnie. On est tout seul maintenant. D’autant plus qu’on a arrêté les Beatles ou les Rolling Stones. On va chercher la brouette. On y met des planches pour pouvoir la charger au maximum. Et l’on entasse. Et l’on fait quatre rangées au moins. On reste dans la mouillasse maximale. Heureusement qu’on garde son tablier et ses grandes bottes noires. Le tablier, des fois, il est si grand qu’on marche sur le bas. Gaffe de ne pas t’encoubler, coco ! Et l’on charrie les fonds sur le derrière de la maison, on dit derrière, et pourtant c’est au levant, là où les fonds sécheront le mieux. Pour les sécher, on a construit nous-mêmes un séchoir. Regardez les photos. Il s’agit de listes verticales clouées sur des lambourdes horizontales. Ca fait des petits compartiments, des centaines de petits compartiments dans chacun desquels on peut placer, soit un grand fond, soit deux planchettes mises l’une sur l’autre. On empoigne une pile sur la brouette, on la tient contre soi, et hop, de la main droite, on commence à mettre les fonds en place. Il faut un certain rythme. Les fonds, tant l’on va vite en somme, ils cognent contre le mur qu’il y a derrière le séchoir. Et ça fait comme un bruit de fonds bien caractéristique de l’automne et de l’hiver. Pour le haut, faut savoir allonger le bras. C’est un rien pénible. Alors on commence par le haut, on suit par le bas qui demande aussi une certaine souplesse, on en profite pour marcher sur le bas de son tablier, et ainsi pour finir on n’a plus que le milieu, le dessert. Ca y va. Ca cogne, On a vite fini une brouette. On va en chercher une seconde. Quand on met les piles sur la planche, ça cogne aussi. Le bruit des fonds, là-bas, ici, pour chacun d’eux ou par pile, s’entend ainsi partout dans la maison.
    Je me souviens. Quand ils avaient séché et qu’alors nous avions au boulot le grand Pie qui s’en occupait, tant celui-ci était content qu’ils soient  bon secs, il les faisait claquer. Ca c’était le grand Pie, faire claquer les fonds. Pour  lui une sorte de bonheur, le summum de son existence même.  Il n’était pas mauvais employé. Il avait juste tendance à mesurer son travail par brouette. J’en ai fait trois de brouettes, cet après-midi, qu’il disait, et il m’en reste une à faire avant ce soir. Il calculait ainsi, en brouettes. Et là-bas, près du bassin quand c’est lui qui lavait, c’était le grand manitou. Fallait pas lui prendre son eau chaude. Il la calculait. Des fois, pour pas qu’on la lui prenne, il la vidait toute dans le bassin ! Il avait ses manies. Pas mauvais bougre mais plein de manies ! L’été, il était berger sur le Crêt à Châtron, un alpage au-dessus du village. Il était employé par  le Syndicat.  A l’automne il venait travailler chez nous. Il a fait ça quelques années, le grand Pie, un pur Fribourgeois qui allait à la messe tous les dimanches, sapé comme un mylord ! Et puis, avec l’âge, de laver tous ces fonds, ça lui était devenu trop pénible. Il avait abandonné. Alors on a  pris des laveurs parmi notre personnel ordinaire. A chacun son tour. Certains acceptaient sans se faire prier. D’autres renâclaient. Tout mais pas ça. Alors des fois je m’y mettais. Et pourtant, quand l’on étend, là-bas derrière la maison, au soleil, on est bien. Evidemment, il y a aussi les jours de cramine où tu te gèles les pognes. T’auras 
 
 
Bernard Rochat étend des fonds derrière chez Gaston Rochat !
 
vite fait, tu ne perdras pas ton temps à lambiner. Tes heures seront bien remplies. Tu ne voleras pas les sous de ton patron, tonnerre!
    Là-bas, derrière, à mettre ou à retirer les fonds. Au soleil, au grand air, tandis qu’ils sont tous enfermés dans les caves. On entend les vaches en champ. On voit vivre le village, quand bien même au Crêt-du-Puits on est un peu à l’écart. On entend aussi les élèves en récréation dans la cour, de l’autre côté, parce que cette maison, elle est juste à côté du collège, qu’il n’y a qu’une petite rue pour séparer les deux bâtiments.
    Toc, toc,  c’est régulier, c’est un bruit que l’on reconnaît quand l’on passe par là, un bruit de bois. Toc, toc.  Et le séchoir se remplit. Et il n’y a plus une  place de libre maintenant, ni au séchoir principal ni au secondaire qui est dans l’encoignure. Et s’il reste des fonds dans la brouette, ce sera pour demain. Ou alors on les mettra à l’intérieur, dans une petite pièce où l’on a un séchoir électrique, une sorte de gros foehn. On le sert surtout quand il pleut, ou qu’il neige, et que dehors, à cause de l’humidité qu’il y a, on ne peut vraiment rien sécher. Et les fonds, pour un nouvel usage, ils doivent être secs. Non, jamais d’humidité.  C’est un peu comme si toi, tu mettais une chemise encore un peu mouillée ou que tu t’enfilais entre des draps  humides. Le bois a son importance dans la maturation des vacherins. Pas de vacherins sur du métal, impossible. Ni sur du plastique non plus. Ca ne respire pas, ces matières là, tandis que le bois, pôvr’ami, c’est un matériau noble, et il se polit avec l’usage, et à force de mettre des vacherins sur les fonds, on découvre que le bois de ceux-ci est devenu beau brun, un peu patiné, avec la marque des vacherins dessus, des ronds blancs.
    Le vacherin qui ne demande qu’un environnement naturel. Du bois et encore du bois. Du bois pour la sangle, pour les fonds, du bois pour les carrelets et les liteaux en cave, avec lesquels on fait des pendants sur lesquels reposeront les vacherins. Du bois encore pour les boîtes. Et finalement on met les vacherins dans des palettes qui sont en bois. Tout est en bois, sauf le fromage ! Et puis encore. On a trouvé un slogan. On a dit : « pétri de forêts et de pâturages ! ». Du bois qu’on a utilisé depuis que le vacherin existe. C’est un monde. Et il apparaît immuable. On lavera des fonds encore dans cent ans. Et dans cent ans encore, comme aujourd’hui, on les mettra au soleil pour les faire sécher. Au bon soleil qu’il y a derrière la maison…
 
 
Ces bons vieux hivers d’autrefois qui vous glacent les serrures…
 
 
et un petit tour derrière chez Toti pour découvrir le séchoir qu’il y a…
 
    La seconde vie des planchettes à vacherin Mont-d’Or – par Claude-André Depallens, artiste peintre à ses heures et passionné de la Vallée.
 
    Comment l’histoire d’un pur hasard additionné à de la chance puis à une rencontre fortuite, vont relancer cette magie de la deuxième vie des anciennes planchettes à vacherin Mont-d’Or combières.
 
   
Vouées à la destruction massive suite aux problèmes qu’on leur a connu à la fin du siècle passé, j’ai eu l’occasion d’en récupérer une petite partie destinée à être transformée en bois d’allumage pour le potager de ma cuisine. Malheureusement trop longues de 5 cm pour le foyer, elles allaient rester empilées au fond du bûcher,  en attente d’autres fonctions,  d’un avenir et d’un emploi inconnus.
    L’art de l’imagination vient parfois dans de drôles de circonstances. Il a fallu pour moi me retrouver, il y a quelques années, à un de ces nombreux marchés de Noël pour y découvrir un artiste qui m’a spécialement étonné par ses animaux de ferme peints sur des planchettes à vacherin, les même que celles « oubliées » au fond du bûcher ! Il y en a de diverses grandeurs, différentes épaisseurs, certaines ayant même les angles rabotés, certaines relativement peu usées, d’autres bien de trop, laissant apparaître un veinage assez profond qui nous prouve que les dites planchettes étaient usées jusqu’à leur maximum possible durant de nombreuses années, des nœuds par-ci, par-là, ou encore des fentes. Voilà en quelque sorte l’aspect des planchettes qui ont toutes cette indélébile marque plus ou moins prononcée,  ronde  et blanchâtre et de divers diamètres,  qui nous prouve leur utilisation au fil des ans.
    Et voilà une première planchette qui ne finira pas au feu. On est en avril 2004. Hélas, un événement lié lui aussi au feu, en automne, va me faire mettre le projet « planchettes » en veilleuse. 2005 le néant. 2006, deux pièces. Printemps 2007, début de cette collection d’un autre genre. Je savais ne pas être l’initiateur de l’utilisation de ce genre de support, mais désormais,  avoir  le pouvoir de sauver par la magie picturale un des tout derniers stocks, peut-être même le dernier,  devenait pour moi une imprégnation supplémentaire avec la région, ma série de boilles et bidons à lait peints en ayant été une autre.
    Désormais une série des anciennes planchettes « AU CHALET » de Christian Golay, ainsi que quelques-unes découvertes comme bouche-trous du poulailler désaffecté depuis de nombreuses années, ainsi que vingt-cinq autres trouvées dans l’écurie de « L’ANCIEN POSTE »,  21 route de Mouthe, - je ne connais hélas pas le nom du producteur à vacherin qui a utilisé ces planchettes-là, mais une certitude, elles traînent ici depuis des lustres[2] -, sera mise en valeur.
    Combien de personnes ont manipulé ces vénérables planchettes d’un autre temps ? Pour combien de vacherins ont-elles servi de support ? Combien de fois ont-elles été nettoyées, séchées, stockées avec minutie pour finir quand même par devoir être impérativement détruites ? Je suis convaincu par exemple que Victor Golay,  bien connu des Combiers et que toute la presse romande désignait comme « Le pape du vacherin Mont-d’Or » le jour de sa disparition, au surnom de Toti, était un grand homme, au sens propre comme au figuré, qui a certainement utilisé sa vie durant une partie de ces vénérables planchettes coupées dans les épicéas de la région et qui donnent ces saveurs inégalables à ce fameux produit régional titré d’AOC depuis peu, planchettes  que j’utilise actuellement comme fonds de tableau.
    Et puis pour moi aussi  il y a eu cette rencontre fortuite avec ce personnage que je qualifierais sans autre picturalement de « riche en couleurs » par ses connaissances et sa passion sans fin de communiquer aux autres cette fameuse histoire combière au fil des ans, des siècles et des millénaires ! Il écoute les gens, rassemble, écrit, édite l’histoire tout simplement. Et au hasard de cette rencontre en ce début novembre 2007 où je lui fais visiter le local de stockage de mes tableaux aux Charbonnières désigné sous le nom pompeux de Galerie « ARTS 21 », que j’ai bien failli par ailleurs appeler Galerie « ROSSEL’ » 21 (lire ROSSEL’ à l’envers comme Galerie de ‘’l’Essor’’ bien connue des combiers !), et au cours de la visite où je lui dévoile ma collection de planchettes à vacherin Mont-d’Or que j’ai peintes, il me demande si je connais l’artiste Michel Chaperon,  le précurseur probablement de l’œuvre picturale sur planchettes à vacherin Mont-d’Or dans les années 70-80 et décédé en octobre 2006. Hélas non ! Pour moi, je lui avoue cette lacune. Après une longue discussion présentatrice de ce génie imaginatif qui va travailler ensuite sur d’autres supports avec l’acrylique, Rémy Rochat m’offre spontanément la brochure sur Michel Chaperon, Jadis no 151, qu’il a éditée sur les machines de ses Editions le Pèlerin aux Charbonnières. L’histoire est belle, touchante, un brin émouvante et nostalgique où, par le biais d’une rencontre fortuite d’un samedi de novembre 2007, je découvre un des artistes qui a, par son génie imaginatif, sauvé une infime partie de ces planchettes à vacherin Mont-d’Or, mais qui n’étaient pas encore anciennes et en danger de destruction à cette époque. Mais  pour moi et ma série,  ce sauvetage entrait dans l’histoire combière et des planchettes à vacherin Mont-d’Or ! Lui, hélas les transformait en les faisant raboter à les rendre lisses avant de les peindre !
    Avis de recherche : qui possède une ou plusieurs de ces planchettes peintes par Michel Chaperon ? Nous serions, Rémy Rochat et moi-même, comblés de pouvoir, l’espace d’un moment, admirer le travail de cet artiste,  et pour Remy Rochat d’augmenter son patrimoine d’archives sur le monde combier au fil du temps.
    Pouvoir faire traverser le temps à une infime partie de ces anciennes planchettes sauvées par un foyer de potager trop court de quelques centimètres, est pour moi redonner vie à une histoire qui devait s’achever là,  comme ça, en cendres. Ainsi va se poursuivre une belle histoire, celles des planchettes à vacherin Mont-d’or, bien combières celles-ci. Le titre de cette collection exceptionnelle : « Arrivée de L’Authentique Maître Rodolphe Le Pèlerin Au Chalet « Le Charbonnier ».
 
 
 
 
 
    La seconde vie des planchettes à vacherin Mont-d’Or –
suite
 
    Stratégie d’une sauvegarde par l’artiste
 
   
Comment une planchette vouée à la destruction devient un objet vivant et agréable au regard,  peut être admirée avec une certaine fascination tandis qu’on remarque nettement les marques d’usure du temps, des lavages successifs ainsi que celles d’un salage modéré prodigué au fil des ans. Tant de fois manipulées, empilées, retournées, lavées, séchées. Certaines d’un bois dur, presque impénétrable à l’eau et à la salaison, d’autres d’un bois spongieux, absorbant bien de trop le liquide et qui se sont irrémédiablement  bombées au séchage, chacune avec son identité bien particulière où les petits trous plus ou moins fréquents nous indiquent que les cirons ont voulu y goûter sans pour autant s’y installer à demeure et même s’ils se sont plus spécialement attaqués aux plus épaisses au bois certainement plus tendre. Le principe de base que j’ai adopté a été de conserver au maximum la surface « bois » et les diverses marques de leurs fréquentes utilisations dans toutes les conditions. Garder une trace par-ci, mettre en valeur un nœud et des fentes par-là, utiliser les différents teintes naturelles qui ont été conservées au maximum et englobées au mieux pour ressortir les caractéristiques particulières des planchettes, la magie de l’artiste s’étant laissé aller aussi à une imagination fertile liée bien évidemment au vacherin Mont-d’or, les mouvements de montres nous prouvant l’interconnexion du temps que met un bien coulant pour s’extraire de sa boîte, les têtes de vaches nous rappelant sans détours leur « indispensabilité ».
    Cette série rare de 60 planchettes demeurera à tout jamais exceptionnelle par le fait de la destruction volontaire des divers stocks liés aux problèmes qu’on leur a connu à la fin du siècle passé dans toute la région. Mais en reste-t-il quelque part ? Alors je me mets à votre disposition pour vous les « détruire » à ma façon ! A suivre…
           
                                                                                            L’artiste CAD
                                                                                                                                  
 
 
 
 
    Une collection unique – R.R. -
 
    Bien entendu pas question de se quitter sans rendre visite à la galerie de l’artiste dont les planchettes à vacherin peintes constituent l’originalité la plus marquante de ces dernières années.
    On admirera le travail de l’artiste ayant su exposer ses motifs sur une surface qui comprend des particularités à n’effacer sous aucun prétexte, veines du bois, nœuds apparents, usure de la matière, mais surtout ces ronds blancs  prouvant le long usage de ces planches en vue de recevoir des vacherins qui leur ont imprégné à jamais un peu de leur sel et de leur calcaire, à moins que ce soit encore quelque autre élément de ces pâtes molles dont l’histoire sur sol suisse est bientôt deux fois centenaire.
    Respect donc d’une matière noble, le bois, que l’usage et la destination ont façonné pour nous offrir aujourd’hui, tandis que l’artiste y a apposé sa griffe, des œuvres originales qui sauront un jour égayer l’une ou l’autre de nos maisons.
 
    Un parcours initiatique …  et une manière originale d’utiliser certaines de ces planchettes en les fraisant…                                                                                                     
 
  
 
 
   
L’artiste sait utiliser de la manière la plus adéquate la couleur et les veines du bois qui constituent ainsi un des éléments les plus caractéristiques de l’œuvre, la création de l’artiste ne recouvrant jamais le support de base, ce bois façonné et usé par le passage de multiples générations de vacherins en même temps que par les mains de l’homme pinçant la planchette surtout sur les bords, le milieu étant toujours réservé à la pâte molle en maturation.
 


 
  
Ces soleils de fin du monde, ou au contraire du début, si chers à l’artiste qui en fait le centre absolu de l’œuvre, le reste de la création posé en périphérie en touches discrètes,  juste là pour vous signaler que tout de même c’est ici que l’on habite, et non pas dans un univers cosmique si lumineux soit-il. On admirera ici le grand rond blanc, espace exact où reposait le vacherin, que n’a peu ou pas retouché CAD qui en fait le halo laiteux émanant de la masse formidablement puissante  du soleil.
 


 
  
Les teintes plus froides d’un bel hiver à la Vallée de Joux, du côté du Bas-du-Chenit. La Dent-de-Vaulion, on l’aura compris, reste omniprésente dans cette œuvre pittoresque. Quelques rares fonds ou foncets, soit planchettes à vacherin, gardent encore la marque du propriétaire, ici une société non déterminée de la région  ou de plaine, finalement ces foncets ayant l’art de voyager, tandis qu’ils étaient rachetés par un commerce d’une autre entreprise en cessation d’activité. On ne détruisait pas les fonds tant qu’ils pouvaient encore servir. D’où en fin de compte une usure presque toujours conséquente, mais seule apte à donner au produit toute sa beauté, toute sa valeur aussi en terme d’antiquité.
 


 
 
 Vue presque similaire mais où cette fois-ci l’artiste a su utiliser la matière du support et sa belle couleur patinée au maximum. De telle manière que le ruisseau est couleur bois, et que le halo entourant la Dent de Vaulion, centre de l’œuvre, n’est que la teinte naturelle de la planchette imprégnée de sel et de calcaire. Il s’agit ici de l’une des œuvres les plus réussies de la série où le  travail du temps et de la main de l’homme compte autant que le travail de l’artiste.
 
Trois Dent-de-Vaulion, c’est peut-être monotone pour une description de l’œuvre générale de l’artiste, mais présentation rendue nécessaire pour faire comprendre certains éléments de base de cette production. Le soleil et la lumière toujours fondamentaux, un élément type du paysage combier assurant un équilibre nécessaire et déterminant aussi la région constitué par une montagne, et puis une marque apposée sur le bois, élément ancestral tandis qu’alors, en ce temps-là, une entreprise d’affinage n’était jamais bien grande et qu’on pouvait s’autoriser sans problème à passer l’entier du stock des planchettes à la marque à feu.
 
 

 
Le pâturage, thème aussi cher à CAD qui en d’autres lieux a choisi le Chalottet pour en faire un thème essentiel de son œuvre, alpage où par ailleurs il a eu plusieurs fois l’occasion d’exposer ses peintures, lieu privilégié où en cette occasion se mêlent harmonieusement art et gastronomie ! Le succès de ces manifestations prouve amplement que cette conjonction n’est pas si étonnante qu’elle pourrait paraître.
 
 
 

  
Et une belle vache pour finir la série, et pour montrer que c’est tout de même grâce à elle qu’on peut obtenir un produit tel que le vacherin, et que donc c’est grâce à elle aussi qu’existent les planchettes à vacherin, en conséquence, quelques demi-siècles après leur utilisation normale, leur transformation en œuvre d’art. Et maintenant à vous de jouer !
 
 
  
    L’affaire des planchettes à vacherin Mont-d’Or et leur 2ème vie : prospection, découvertes, synthèses et fin de l’histoire
– par Claude-André Depallens
 
    Si des réponses amènent de nouvelles questions, certaines réponses sont fructueuses au point d’apporter « un peu d’eau à la rivière », comme on le dit. C’est ainsi que de nouvelles découvertes sur ces mystérieuses planchettes, ont pu être faites dans la maison de Patrick et Susi Cotting, cette ancienne construction du 21 de la route de Mouthe qui était autrefois le poste de garde douanier des Charbonnières. Me voici donc avec la possibilité d’utiliser une nouvelle série de ces planchettes découvertes dans le fond de l’écurie servant actuellement de dépôt aux ustensiles et réserve de cuisine du Ski-Club des Charbonnières. Il y a là une magnifique pile de ces vénérables planchettes  stockées ici par miracle dans l’attente d’une utilisation qui n’aura pourtant plus jamais lieu, mis à part comme petit bois d’allumage ou, destin plus enviable, en servant de fond de tableaux à un artiste désireux de s’éclater sur un autre support, celui-ci presque en 3 D, au gré d’une inspiration particulière d’où la réflexion n’est pas absente : quel est le côté le meilleur, comment utiliser au mieux ces nœuds, ces traces visibles de l’usure apportée par leur longue utilisation d’autrefois, ces fentes, ces cassures, ces formes différentes suivant les séries ? De quelle manière appréhender le mieux ces nervures de la matière  qui donneront le plus de valeur à l’œuvre, tout en pensant qu’immanquablement, suivant le choix et la marque des couleurs, le bois va modifier au cours du séchage la teinte de la peinture par une absorption variable ? Et rajoutons que le sel et le calcaire, plus ou moins incrustés dans la matière,  accentueront  encore  la difficulté entre le désir artistique du départ et l’obtenu. Mais finalement l’expérience de l’artiste et la magie de l’inconnu, donneront à l’œuvre un résultat fantastique aux équations de ces divers paramètres.
    Mais avant de voir de tels résultats, les planchettes sont là, empoussiérées, certaines nettoyées sommairement lors de leur dernière utilisation, bien empilées entre les poutres de séparation de deux des cinq crèches que comportait cette petite étable qui servait sûrement, plus qu’à une occupation principale, à un apport financier indispensable aux douaniers du lieu. Car ainsi était l’époque, il fallait doubler ses activités, non pas seulement pour arrondir ses fins de mois, mais simplement pour vivre. Ce que l’on faisait aussi grâce au potager qui constitue aujourd’hui la grande surface gazonnée entourant la bâtisse, grâce au poulailler, et à l’aide surtout de ce petit train de campagne, avec  sa grange à foin et à paille aujourd’hui utilisée comme atelier-galerie-bûcher par l’artiste de l’endroit dont il a fait sa résidence secondaire. Tous éléments de ce passé qui nous permettent de dire aujourd’hui qu’à l’époque on ne perdait pas un centimètre carré du cultivable, ni même de l’habitat dont les sous-sols aussi étaient entièrement occupés, avec, là où se trouve désormais la citerne à mazout, une cave d’affinage dont le plafond est renforcé par les rails de fer de petit gabarit qui me font penser incidemment, et sans que la relation soit de circonstance, à ces mines de fer qu’il y avait dans les talus derrière la maison et dont les mouvements du terrain ne seraient en somme que les effondrements successifs des anciens puits et galeries.
    Mais ne  nous perdons pas dans les dédales de trop d’inconnues et revenons à la maison où une autre partie,  transformée dès lors en carnotzet, permettait d’entreposer les récoltes de l’année en fruits, pommes de terre, carottes et autres choux-raves si nécessaires pour affronter les rudes hivers de l’époque, et une autre qui a servi de tout temps de buanderie, avec son grand bassin de ciment et sa chaudière qui a tant lavé de linge, et qui le sait, peut-être aussi la multitude de ces planchettes à vacherin.
    On saura que cette construction, de bâtiment douanier, allait devenir bientôt une maison ordinaire du village avec un nouveau propriétaire en la personne de Louis Golay, longtemps homme à tout faire puis directeur des Glacières du Pont, puis en celle de son fils, lui aussi appelé Louis Golay, cantonnier de profession, les deux faisant perdurer les fonctions originelles des différents locaux, avec néanmoins pour Louis Golay père seul  la transformation de l’une des caves en local d’affinage.
    Retour aux planchettes issues de cette nouvelle affectation. Et attardons-nous sur le plaisir qu’il y a pour moi de pouvoir choisir une série en fonction de leur état de conservation après des décennies de stockage prolongé. Et surtout sur cette joie immense de découvrir que quelques-unes de ces planchettes portent une marque apposée au fer chaud, les initiales de l’auteur de cette opération : J-A D, le tout cerclé. Question naturellement fondamentale : qui est ce J-A D ? Le seul personnage que je connaisse en mesure de me renseigner  ne serait autre  que Rémy Rochat qui,  à vrai dire,  ne m’offre aucune réponse précise,  mais par contre me donne quelques indications bonnes à prendre : ces fonds à vacherin ont très certainement plus de 100 ans parce qu’à l’époque, avec des commerces de faible  importance souvent, il  n’était pas inutile de marquer les planchettes au fer, signe de propriété qui permettait d’empêcher un non retour au cas où elles auraient été prêtées.
    Une certitude cependant, on ne faisait pas grand cas de la qualité lors de leur découpage, puisque de toute les sortes de planchettes retrouvées à ce jour, la série marquée J-A D sera de loin celle de la plus mauvaise appréciation dans le choix du bois et de la forme qui est d’une découpe très approximative, tandis que la plupart des autres planchettes rencontrées jusqu’alors avaient une forme souvent carrée et un bois d’une texture plus correcte. D’où ma question : serais-je tombé sur une série qui constituerait le début de la fabrication de  ces planchettes, qui émaneraient en conséquence d’une époque où seule comptait l’efficacité directe en cave sans penser à une pratique régulière  où une forme géométrique « calibrée » aurait permis  un stockage plus aisé ?  Mais dans cette situation de brut pour net, il est aussi à considérer un autre élément qui est le coût. Je suis à même de penser à ce propos que le meilleur du bois partait pour la fabrications des meubles, des poutres, des chars, et que l’on réservait le bois de deuxième venue pour les planchettes à vacherin.
    Un personnage clé de l’affinage combier, Christian Golay, dont il est méritoire de dire qu’il poursuit encore la production familiale commencée en 1878, selon la date que l’on découvre sur les couvercles de ses boîtes à vacherin « AU CHALET », ce qui en fait la plus ancienne marque de Mont-d’or connue et reconnue à ce jour, me donne une réponse différente pour expliquer ces marques pyrogravées: ce serait la « signature » de la scierie plutôt que celle d’un hypothétique producteur-affineur isolé. Il m’a convaincu et je m’arrêterai là dans mes recherches. J-A D sera donc désormais la marque de fabrique de la scierie qui a fait ces planchettes à vacherin. Celles-ci utilisées, lavées, séchées, entreposées, utilisées, lavées, séchées… pendant combien de décennies pour être ensuite,  un certain jour,  abandonnées pour être stockées là, entre les boxes  4 et 5 de la petite étable, ne gênant désormais personne, pour être enfin la « proie » bienvenue de  l’artiste qui est passé par là. Ainsi donc ira la deuxième vie de ces planchettes à vacherin.
    Mais attention, rien n’est encore terminé, et un élément crucial va m’obliger à rouvrir l’enquête et à faire progresser mes recherches. Voici donc apparaître un nouveau personnage, Eric Rochat,  ayant été lui aussi affineur aux Charbonnières dès la reprise du commerce de son père  en 1959. Il habite-là, presque en face du 21 de la route de Mouthe. Sa maison de plusieurs appartements ne laisse que peu transparaître que le sous-sol était récemment encore constitué de caves d’affinages. Et Eric Rochat va me dire que les planchettes que son père utilisait étaient bel et bien aussi marquées au fer aux initiales de celui-ci, soit W.-H. R., pour Wilfrid-Henri Rochat. Donc un maillon de mes recherches a par hasard abouti. Cet ancien commerçant me confirme même que plusieurs affineurs du village faisaient de même apposer leur marque au fer, soit en quelque sorte leur « LOGO » personnalisé. Il me précise de plus  que le propriétaire du 21, route de Mouthe, était bien ce Louis Golay, directeur des glacières du Pont, officiellement Louis Golay-Dupraz, du nom de jeune fille de son épouse.
    Ainsi s’achèvent  mes recherches. Elles débouchent maintenant sur une belle aventure  artistique, avec ces peintures sur planchettes à vacherin issues d’un autre temps pour traverser les décennies voire les siècles et pour échouer enfin en notre vingt et unième siècle, témoins d’une profession qui se termine au fur et mesure que s’effacent les noms de ceux-là qui ont arrêté le métier pour une retraite bien méritée, l’évolution ayant eu finalement raison de la multitude de ces affineurs que l’on trouvait autrefois en ce village.
    Il ne me reste plus qu’à remercier ceux qui ne les ont pas toutes brûlées où dont les renseignements m’ont été précieux, Christian Golay et Eric Rochat, affineurs, Susi et Patrick Cotting, les propriétaires, qui m’ont offert la possibilité fantastique de me servir de quelques-unes de ces planchettes retrouvées dans l’écurie de la route de Mouthe, mon épouse Dominique, artiste peintre sur porcelaine qui a mis à ma disposition une série de photos de belles têtes de vaches !, auxquels tous  je suis redevable de cette série de 96 pièces peintes sur bois.
    Merci aussi à Rémy Rochat qui a été très intéressé par cette démarche originale et qui s’est joint à cette aventure en publiant cette brochure dans la collection « Economies laitière et alpestre » dont elle constitue le no 103.
    Et que vive aussi encore très longtemps l’histoire des planchettes des temps modernes !
 
    Texte de Claude-André Depallens, affiné par l’éditeur, lui aussi ancien affineur !
 

Une belle photo de famille avec Louis Golay-Dupraz, employé puis directeur aux Glacières du Pont, fils de Charles-David-Louis Golay cafetier, son épouse Emma et ses trois premiers enfants, Jenny, Eglantine et Blanche.
 
              Et une nouvelle série de planchettes à vacherin pour vous distraire…
 
 
  
 
 
Planchette avec inscription JAD spécialement endommagée par les multiples utilisations et de gourmands bostryches. Paysage hivernal mis en valeur par des faisceaux lumières venus d’un spot invisible.
 
 
 

Création avec cadre à la défonceuse. L’artiste a spécialement mis en valeur les nœuds de la planchette pour la coupe des troncs ainsi qu’une fente du bois devenu piquet au 1er plan.

 

 
    Importante trace de sel et de calcaire pour une mise en valeur maximum du bâtiment de l’ancien « Café Vaudois » devenu habitations et caves d’affinage. Sous le couvert se trouve l’emplacement réservé au séchage des planchettes – voir photo du bas de la page 12.
 
 

 
    Version temporelle de l’utilisation d’une planchette et de l’interaction du mouvement où l’artiste sort du relationnel en liaison avec le vacherin, mais celui-ci ne met-il pas un certain temps pour s’écouler en fonction de sa consistance liée directement à son affinage ?
 
 

 
        Décor de fin d’hiver tout en mouvements avec une superbe mise en valeur de traces d’affinage. On n’oubliera pas que le vacherin, en cours de maturation, est simplement cerclé de sa sangle tenue par un élastique, sangle à laquelle, pour la mise en boîte du produit,  on fera subir une entaille franche qui permettra de  serrer le vacherin au diamètre exact de la boîte dans laquelle on l’introduit pour la vente.
 
 
 

    Une dernière planchette originale en forme d’avis de recherche : qui est ce JAD que l’artiste n’attend même plus de découvrir, convaincu qu’il faut toujours garder une part de mystère à certaines choses afin qu’elles gardent une valeur indispensable à la vie. Le mot de la fin ? La vie n’est pas un problème à résoudre mais un mystère à découvrir.
 
             
 
 
La 2ème vie des planchettes à vacherin Mont-d’Or
 
Série 026-050
 
Impression : Editions Créat’Art Déco à Nyon 
 
Sortie officielle : Les Charbonnières, 12ème fête du vacherin Mont-d’Or
27 septembre 2008
 
 
 
Textes : Claude-André Depallens affinés par Rémy Rochat
                                        et Rémy Rochat pour les précieuses informations de l’époque
 
 
 
      C-A Depallens                                                         Rémy Rochat
 
 
 
 
 
 
             C’était comme ça : Quelques vues du Crêt à Châtron Vieux
 
 
           
 

Intérieur du chalet du Crêt à Châtron Vieux à la fin du XIXe siècle. Assis à gauche, le « patron », Fernand Rochat de la Cornaz. On voit au fond les escaliers qui montent à l’étage. L’enrochoir « Depallens » n’est pas visible qui se trouvait être au niveau du photographe ou à droite.
 
 
 

 Fernand Rochat et sa nombreuse famille derrière le Crêt à Châtron Vieux à la fin du XIXe siècle.
 
 
 

A droite, Fernand Rochat de la Cornaz derrière le Crêt à Châtron Vieux, fin du XIXe siècle
 
 
 
2014,…………. L’HISTOIRE CONTINUE, une aventure se poursuit.

2014, pour moi, l’année casse-santé et du temps pour me remonter, temps ‘’libre’’ entre les casses ou lorsque ça va un peu mieux pour moi et que l’accalmie me permet de me libérer l’esprit par la peinture et surtout la chance de la découverte d’une nouvelle cache d’anciennes planchettes à vacherin Mont-d’Or dans le fond de l’écurie du 21, une pile, un tas à débiter en petit bois, mais l’artiste est passé par là et en accord avec le propriétaire Patrick Cotting je franchi la barre des 200 planchettes sauvées à tout jamais de la destruction. Un vrai bonheur.
2015 je compte dépasser la barre des 250 avec entre-autre la réalisation d’une petite série en 3D avec des chaînes de tronçonneuse de petite dimensions, mais quel projet d’un autre genre, une certitude, il y a de la réserve encore là-bas au fond de l’écurie du 21, mais il faut trier car certaine sont juste bonnes à faire du petit bois, rien de plus.
La série avec chaînes de tronçonneuses, encore un projet un peu fou et à la fois original au possible, l’œuvre de base mettant en valeur les nœuds de la planchette qui deviennent troncs, et la chaîne fixée quelque part qui au gré de la magie des doigts et de l’inspiration se déplace parmi des clous placés par-ci, par-là, celui qui admire et s’extasie devant l’œuvre devenant aussi un créateur temporel imaginatif, mais attention à la manipulation de ne pas se tailler le bout des doigts car la chaîne que l’on croit ‘’morte’’ est pleine de mordant pour y laisser des traces sur le bout de votre doigt ou vos doigts tout simplement !
Et encore mieux, dans la pile tout là-bas au fond de l’écurie, tout au fond de la pile, derrière une empilée de toile d’araignées, de poussière du passage de nombreux sirons, de poussières tout simplement cumulées au cours des ans, ça fait tout de même près de trente ans qu’elle sont là ces planchettes au fond de l’écurie et dont une bonne partie ne passera pas au feu, mais je m’égare un peu, tout ça pour dire que j’ai découvert à mon grand bonheur une planchette avec des nouvelles marques totalement inconnues de moi, et pour la première fois aussi il a deux marques bien distinctes sur la même planchette, une dans l’angle supérieur gauche et l’autre dans l’angle diamétralement opposé :

                                                    HV                               AC

Et me voilà avec de nouvelles recherches d’identités, y aura-t-il une réponse ? Là est ma question, je vais dans la mesure du possible tout tenter pour y donner une ou des réponses. Décidément cette deuxième Vie des Planchettes à Vacherin Mont-d’Or n’en finit pas de m’étonner,……même l’historien-éditeur combier Rémy Rochat ne donne pas une réponse à toutes mes questions, et dire que toute cette fabuleuse histoire a failli ne pas avoir lieu parce que tout simplement elles devaient et auraient servi à l’allumage de bien des feux de cheminées ou de potagers.

L’artiste continue, l’aventure persiste, la sauvegarde s’intensifie,….un jour il n’y aura plus de ces fameuses planchettes à vacherin Mont-d’Or du Millénaire et siècle passé. Le Mont-d’Or aura définitivement tourné la page de son passé sur son passé des planchettes pas forcément si innocentes de toutes ces histoires bien noires de la fin des années 80, celle qui a provoqué la destruction massive de tonnes de vacherin, et de la destruction ‘’totale’’ de toutes les planchettes,……
Les planchettes sont mortes, longue vie à ce fameux vacherin Mont-d’Or qui n’a toutefois pas sût et pût garder le vrai fond de son origine à la Vallée et qui s’est hélas égaré au-delà de la frontière naturelle du Jura, son berceau originel, une partie de sa fabrication étant partie du côté du bassin lémanique, osons espérer que le bois des nouvelles planchettes actuelles a bien conservé son penchant combier 100% ! A en observer le devant de certaines fermes, les sangles, elles sont bien de là-bas, on les voit se sécher, pendues côté soleil des façades, sous les avant-toits.

 
 
 

 
 
 

Petit exemple d’une planchette ‘’équipée’’ d’une de ces fameuses chaîne de tronçonneuse. Le rond blanc étant le salpêtre des années d’affinage. La chaine est ‘’mobile’’ au moyen de petits clous habilement placés par-ci, par-là par l’artiste. La chaine étant maintenue par un point fixe sur le haut.
 
 
 
 
 

 








Et un jour l’histoire des Planchettes à Vacherin Mont-d’Or s’arrêtera, elle aura été pour moi une magnifique et invraisemblable aventure qui d’une simple impossibilité de les rentrer en petit bois dans notre potager de la cuisine du 21 Route de Mouthe, de penser par hasard les conserver là-bas au fond du bûcher, et de les ressortir une fois pour en faire quelque chose. Je ne suis pas l’initiateur car comme je l’ai déjà écrit quelques autres artistes ont travaillé avec des planchettes, mais c’est avec certitude que je serai toujours l’artiste de très loin le plus ‘’prolifique’’ d’un nombre époustouflant de ces planchettes, certainement dans la finalité, plus de 300 fois la 2ème Vie des planchettes à vacherin Mont-d'Or sera là pour le sauvetage de ces vénérables choses.
Suite..........et fin.

Enfin je croyais,…..

13 avril 2015 je pensais en avoir terminé définitivement avec cette belle et magnifique histoire, je croyais avoir tout découvert sur ces planchettes d'un autre âge pour une certaine quantité mise à ma disposition par Patrick Cotting sous forme d'une ‘’empilade’’ bien instable au font de la vénérable étable pour 5 vaches dont un gros tas de chenit masquait et y rendait l'accès impossible, il aura donc fallu que le ski club des Charbonnières libère les lieux pour pouvoir enfin atteindre l'ensemble du stock et........l'incroyable s'est produit là tout au fond de l'écurie alors que je commençais mes recherches vers le gros amassement de piles dont une bien sûr s'est fait le plaisir de s'écrouler sur moi, des dizaines de planchettes entraînants du coup l'ensemble des piles sur moi, les planchettes se précipitaient anarchiquement dans la totale impossibilité de retenir cette subite ‘’écroulade’’ ......pas de dégâts personnels, un bon éclat de rire intérieur du bon coup joué par la pile, mais un subit accès du coup à la base des piles, et là le trésor est arrivé sous la forme de trois planchettes très anciennes frappée d'une marque totalement inconnue à ce jour dans l'ensemble des planchettes que l'ai eu l'honneur d'en bénéficier pour leur transformation en sauvegarde de leur 2ème Vie des planchettes à vacherin Mont-d'Or, la marque est originale sous forme d'un cœur d'environ quatre centimètres de diamètre avec à l'intérieur les trois lettres majuscules H R à gauche et droite sur le haut et M en pointe, il me faudra consulter mon Ami l'historien Rémy Rochat afin d'essayer de mettre un, ou des noms à ces initiales,......affaire donc à suivre!
Elle n'en finit pas de rebonds,....mais,…..pas de réponse,……à moins que,…….l’histoire reparte encore une fois,……….

Ainsi s’achèvera cette belle histoire passionnante, avec certitude cette fois, tous les stocks connus à ce jour ayant étés ‘’dûment pillés par l’artiste’’.

 
 
 

Et un petit hommage pictural autobiographique au temps qui passe et années qui s’égrènent à consulter sur www.creatartdeco.ch


Terminé en avril 2015
CAD

 

[1]
Notons que l’artiste Pierre Cotting a aussi peint sur planchettes à vacherin.
[2]
Note de l’éditeur : il s’agit sans aucun doute d’un Golay, de la famille des Tsalottet. Tsalottet = petit chalet, d’où la marque « AU CHALET » de cette famille d’affineurs. 
Dernière mise à jour le 17.02.2022
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